La demande en divorce d’an ancien archiduc

(De notre correspondant particulier)

Genève, 24 juin.

Me Lachenal, avocat de M. Léopold Woelfling, ex-archiduc d’Autriche,a plaidé aujourd’hui, devant la chambre de M. Robert Fazy, dans l’instance en divorce intentée par son client contre sa femme. La plaidoirie de l’éminent avocat a fait ressortir d’une manière frappante le genrade vie qu’on peut qualifier de bizarre, pour ne pas dire plus, qu’était obligé de mener celui qui, avant d’abandonner ses droits, était prince impérial, archiduc d’Autriche, prince royal de Hongrie, de Bohême, etc.

Par l’organe de son avocat, M. Woelfling se défend de rechercher par son divorce le pardon de l’empereur et, comme conséquence, la reprise de tous ses titres, y compris sa charge dans l’armée et son rang de chevalier de la Toison d’Or; il veut simplement la vie calme d’un bour geois.

Me Lachenal rappelle que, peu de temps après son mariage, Mlle Adamovic, qui n’a jamais occupé un rôle quelcotique dans un théâtre, comme on l’a dit, étant marchande de tabac, soeur d’une danseuse, se mit à suivre avec une extrême rigueur les pratiques végétariennes de la colonie d’Ascona. Léopold Woelfling suivit d’abord cette pratique pour complaire à sa femme, mais se régime eut bientôt un effet déprimant sur lui; il’voulut vivre comme tout le monde; il eut alors à essuyer, les reproches de sa femme.

D’après les déclarations que fît Mme Woelfling dans le cabinet de M. le président, elle ne voulait pas faire le malheur de son mari, et ne s’opposait pas au divorce, disait-elle au cours de la séance de conciliation, mais plus tard elle refusa de recevoir l’exploit; et, lorsque le président du tribunal de Zurich le lui fit signifier par huissier, elle le refusa encore.

Des commissions rogatoires décernées à Zoug, il résulte d’après les dépositions des deux domestiques de la villa et de deux autres personnes fréquentant la maison, que la vie était intenable pour Léopold Woelfling.

L’avocat conclut ainsi:

— Léopold Woelfling veut reprendre une liberté qu’il n’aurait jamais dû aliéner à ce point.

“Dans sa loyauté, il a cru qu’il devait une réparation à cette jeune fille. Son geste était celui d’un honnête homme; malheureusement, les événements lui ont donné tort; au lieu de bénir Léopold Woelfling, la jeune femme lui a rendu soin intérieur impossible; c’est pourquoi je demande que le divorce soit prononcé au ‘profit de mon client”.

L’Écho de Paris, 24. [?] Jahrg., 25. Juni 1907, Nr. 8411, S. 3. Online